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L’agir chrétien comme élévation ou valorisation

Jesus ascending to heaven.jpg
Image libre de droit

21 mai 2023              Ascension du Seigneur, année A – Mt 28, 16-20
Lectures de ce jour

La devise « monte plus haut1 » d’une université catholique en République démocratique du Congo s’inspirerait de l’ascension. Le problème est que le Seigneur Jésus ne dit pas à ses disciples de monter au ciel comme lui. Il leur parle de la venue du Saint-Esprit sur eux et d’eux comme ses témoins partout, dans le futur. Le point d’orgue des paroles de Jésus en cette ascension résonne dans l’évangile, permettant de comprendre l’agir chrétien au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit comme élévation ou valorisation.

« Allez »… au large

Ce mot marque en apparence une rupture qui peut être comprise comme celle du cordon ombilical, mais je parlerais de distanciation entre Jésus et ses disciples. Le récit de l’ascension en Actes ne met pas ouvertement le mot « allez » dans la bouche de Jésus, mais il parle d’une nuée qui le soustrait au regard des apôtres. Comme ceux-ci ne se mettent pas en processus de distanciation, mais restent figés là où Jésus n’est plus, deux hommes en vêtements blancs les interpellent.

D’une part, ces personnages extraordinaires donnent un caractère divin à la distanciation, caractère par lequel Jésus échappe à l’emprise de l’espace et du temps. D’autre part, l’interpellation formulée par ces personnages fait office de l’envoi que Jésus adresse à ses apôtres : allez au large, dirait-il. C’est dans cette distanciation que les apôtres recevront le Saint-Esprit et seront témoins de Jésus à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. La distanciation apparaît ainsi nécessaire à la réception du Saint-Esprit par les apôtres et à leur témoignage qui s’ensuivra.

« Je suis avec vous »… comment ?

L’envoi des disciples ainsi que leurs appellations de témoins et d’apôtres disent paradoxalement aussi le « je suis avec vous » de Jésus. On peut comprendre ce « Je suis » comme une marque divine que porte la présence subtile de Jésus à ses disciples. À ce propos, référons-nous à l’épisode du buisson ardent en Exode 3, 14 où Moïse ne voit pas Dieu qui parle de lui-même comme étant « Je suis », qu’on peut traduire par « le souffle » ou « l’imprononçable ». De même, le souffle divin de Jésus se rend présent à ses disciples envoyés par lui. Ainsi missionnaires, non seulement ces disciples agissent comme ils l’ont appris de leur maître absent, mais ils le représentent.

En envoyant ses apôtres, Jésus leur dit : baptisez au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, lui étant le Fils dans cette trinité divine. Ces apôtres sont ses témoins, non pas de simples reporters, mais des personnes qui agissent efficacement comme lui Jésus aurait dû le faire2. Nous avons entendu plusieurs fois Simon Pierre affirmer que les apôtres sont témoins de la résurrection de Jésus, alors que personne ne l’a vu en train de sortir du tombeau. Le témoignage, comme on peut l’entendre dans ce sens, c’est l’expérience personnelle ou communautaire de rencontre avec le ressuscité, une transformation de nos vies à partir de celle de Jésus en prenant soin des affaires comme lui aurait dû le faire. C’est précisément l’étymologie du mot apôtre qui montre que celui-ci représente en tout et en partie Jésus – le je-suis-avec-vous – qui l’a envoyé ; ainsi en est-il de son agir.

Élevé et soustrait aux yeux de ses apôtres, Jésus demeure présent à eux comme un satellite auquel sont connectés virtuellement plusieurs appareils qui communiquent entre eux. Comme dit l’apôtre Paul, le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père dans sa gloire, a fait de lui la tête de l’Église qui est son corps. Notre appartenance à ce corps mystique – dont la tête est invisible – sert déjà de notre ascension ou valorisation et nous permet de témoigner de Jésus toujours et partout.

Sadiki Kambale Kyavumba, a. a.
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1. Traduction française du latin Ascende superius, devise de l’Université Catholique du Graben en République démocratique du Congo.

2. Lire à ce sujet l’article de Jean Richard, « Foi, confession de foi et témoignage », Laval théologique et philosophique 71/1(2015), 7–13.