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DE LA TRISTESSE…

14 novembre 2021 / Articles, Éditorial-Infolettre

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ÉDITORIAL DU DIMANCHE 14.11.2021

Monique Lortie, M.A. phi.

Qui donc éduquera les jeunes générations ?

Tous autant que nous sommes, nous sommes souvent tristes. Tristes de n’avoir plus vingt ans, tristes de l’éloignement de nos enfants adultes et « casés », tristes d’avoir perdu nos gants, d’avoir raté une belle occasion ou la cuisson d’un gâteau renversé aux pêches, tristes de n’avoir vu aucun orignal durant notre si attendu voyage de chasse cette année, etc., etc. Bref, mille et mille choses ont le pouvoir de nous attrister. N’est-ce pas ?

Toutefois, ce qui me frappe, ces temps-ci, c’est combien certains événements sociaux, ou politiques, ou culturels, certaines idées à la mode, ou certaines modes sociales, nous laissent indifférents. Certains événements, donc, qui devraient en principe nous attrister, ne sollicitent bizarrement pas, ces temps-ci, notre sensibilité. Enfin, il doit en être ainsi puisque personne ne hurle. « Tout baigne ».

J’en veux pour preuve l’idée qui se répand chez nous depuis à tout le moins 2018 de la notion d’« appropriation culturelle ». Appropriation culturelle ! Qui dit cette formule aujourd’hui, fait trembler le monde entier. L’affaire serait née, à ce qu’il semble, au sein d’universités américaines (encore !), et conserve, depuis, son ancrage, toujours au sein des universités. – La foule des gens humbles n’en ayant cure, comme on dit.

Si j’en parle aujourd’hui, c’est que le phénomène m’attriste ; m’attriste profondément. Des étudiants de l’UQAC, au Québec, viennent de voir leur fête d’Halloween interdite par les Autorités au motif que « des » étudiants ont exigé le retrait de l’événement jugé intrinsèquement irrespectueux. La fête s’inspirait de la manière mexicaine admirable, chaleureuse et savoureuse de célébrer le Jour des morts. « Des » étudiants, non mexicains par ailleurs, ont fait valoir que cet « emprunt », constituant une forme de spoliation par les membres d’une culture « dominante » ou jugée néocoloniale, était un manque scandaleux de respect. La culture « minoritaire » se trouvant ainsi dépouillée de son identité, et réduite à une simple caricature raciste. L’Université a pris peur et l’association des étudiants a dû non seulement retirer l’événement mais en plus, faire des excuses publiques.

Ce qui est triste, ici, ce qui est très triste, c’est que cet exemple montre à la face du monde que des universités affichent par là un plus que déplorable manque de discernement. Or si les universités affichent ainsi, « le regard clair », un tel manque de discernement, qui donc éduquera les jeunes générations ?

Je crains, de plus, que cette attitude ne soit le fruit du ressentiment, de l’amer ressentiment*. On croit, à tort de nos jours, que les universités sont pures et objectives, qualités essentielles à la recherche scientifique et à la transmission de valeurs culturelles universelles et intemporelles. Il apparaît, avec les exemples qui se multiplient d’incidents sur fond d’une dite « appropriation culturelle » (sic), que la puissance des émotions et des sentiments qui se rencontrent dans le ressentiment sont, même à l’université, à la base de ce mouvement anti-appropriation culturelle qui empoisonne le discernement, ce rempart contre l’ignorance et la bêtise. N’est-ce pas particulièrement triste ?

Une simple méditation honnête des mots « appropriation » et « culturel » montrerait pourtant avec évidence que cette formule « funeste » d’« appropriation culturelle » a quelque chose qui ressemble au « boo ! » des contes à faire peur. N’est-ce pas pitoyable ? N’est-ce pas triste ?

* On lira avec profit l’excellent livre de Max Scheler, L’homme du ressentiment.

14.11.2021


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